L'histoire du Château de Buzay

Buzay incarne l’équilibre qui fit du XVIIIème siècle français une référence artistique universelle. Son architecture unique, aux lignes parfaitement proportionnées, en fait un modèle d’harmonie.

Buzay et Pierre-Étienne Harouard

Le 1er Mai 1771, Pierre-Étienne Harouard, Lieutenant Général de l’Amirauté de La Rochelle et son épouse, Marie Agathe Petit du Petit Val, faisaient poser par leur fille, Marie Louise Henriette, 3 ans, la première pierre de Buzay.
La « maison des champs » qu’ils faisaient construire sur leur seigneurie de La Jarne, à six cents pas du château du Beignon que Pierre Harouard, grand-père de Pierre-Étienne, acheta en 1686, vraiment trop incommode à leur goût.
Par la suite, Seize ans plus tard, en Février 1787, Marie Louise Henriette épousait un jeune officier, Étienne-Pierre de Montbron : les actuels propriétaires sont leurs descendants en ligne directe.
Les plans de Buzay sont de Ducret, architecte parisien proche de Jacques Ange Gabriel, appelé par l’évêque de La Rochelle, Mgr de Crussol d’Uzès, pour rebâtir la cathédrale en ruine après le siège de 1628.

Sans que l’on sache comment, Harouard obtint les plans par l’intermédiaire de l’évêque, son ami, et fit appel à Henri Tourneur, entrepreneur rochelais, pour les mettre en œuvre.
Henri Tourneur était un professionnel de qualité, formé par son père Jean Tourneur. On doit à leur collaboration la Chambre de Commerce de La Rochelle (1750) et nombreux hôtels rochelais qui rénovèrent la ville à la même époque.
Dès lors, plan en mains, avec la continuelle assistance de Harouard qui surveillait les travaux et précisait ses volontés dans le détail de l’exécution, Henry Tourneur édifia Buzay et ses communs, les grilles clôturant la cour étant en place, en cinq ans, entre 1771 et 1776.
Les exécutants en furent des artisans locaux, Dutour maître maçon à La Jarne, Sage maître menuisier à Salles, Ferry et Girard tailleurs de pierres à La Rochelle, Robert ferronnier à La Rochelle pour ne citer que les principaux. N’oublions pas la Maison Chevalier qui a fournit à la fois des meubles et la plupart des boiseries. 
D’autre part, des contrats étaient passés, précisant dans le détail les conditions des prestations, les rémunérations en argent et en nature. A charge de bonne exécution, avec engagement de fournir le nombre convenable de compagnons « afin de n’occasionner aucun retardement ».
Le résultat est celui que nous avons encore sous nos yeux, entre cour et jardin, type achevé de ce style dit Louis XVI – on pourrait dire Louis XV à bien considérer les dates – disons donc néo-classique, rappelant que c’est en 1750 que fut commencée la découverte de Pompeï, peu à peu exhumée des cendres qui l’avaient ensevelie. Nos architectes renouaient avec leurs grands anciens de jadis.
L’hypostyle du côté cour, les colonnes galbées, les chapiteaux ioniques, le fronton : autant d’emprunts évidents à l’architecture grecque ancienne.

Les extérieurs

Le fronton sud a son symétrique, côté nord et présente les armes Harouard et celles de son épouse Petit du Petit Val coiffées d’une couronne comtal. Par ailleurs, le fronton nord respecte l’usage en affichant une allégorie : un cadran d’horloge qu’entourent de leurs bras deux êtres mythologiques, tritons ou néréides, émergeant d’herbes marines. Les aiguilles font apparaître le chiffre de 16 minutes qui serait la différence d’heure par rapport à Versailles, et notamment à l’heure du roi. 
Représentation qui laisse indifférent. Enfin si l’on ignore l’enthousiasme qu’a suscité chez les gens de mer, à cette époque très exactement, la mise au point des « horloges marines », clefs de la solution d’un très ancien – et important – problème : déterminer la longitude. Allégorie toute de finesse : un genre ancien pour un sujet moderne, évoqué, non imposé – révélation de l’esprit de son inventeur.

L’intérieur

En pénétrant à l’intérieur de sa maison, on continue de découvrir Pierre-Étienne. Un homme à coup sûr modeste, d’un abord facile. Il est représenté en médaillon, dans le grand salon, sans perruque, d’un vêtement ordinaire, caressant son chien. D’un goût sûr, à en juger par l’aménagement, témoignant d’un esprit de sage économie et d’attachement à son patrimoine.
Assurément, aussi, un homme de communication. Buzay est une demeure ordonnée à la réception. Le rez-de-chaussée, sur toute sa longueur, consiste en pièces pour recevoir : vestibule, salle à manger, salons; bibliothèque, en enfilade.
Enfin, complément obligatoire du château, le parc. Dès la construction achevée, en 1776, Harouard le fit dessiner. Il suivit les principes de Dezallier d’Argenville, « Théorie et pratique du jardinage où l’on traite à fond des beaux jardins ».
On le voit : Pierre-Étienne était bien de son temps où rien ne se faisait à moitié…
Bernard de Montbron

Le château en image